Les derniers voyages d’Alfred Métraux

8 - Uxmal et autres sites du Yucatan


Sur les instances d’Alfonso Caso, archéologue mexicain, Alfred et Fernande Métraux décident de se rendre au centre indigéniste de Peto. On vient les chercher en jeep à Uxmal. Sur la route Muna-Peto, ils visitent l’église de Ticul, celle d’Oxkutzcab, avant d’arriver à Peto où ils sont invités à déjeuner par le directeur du centre. Un chauffeur les ramène à Uxmal où ils vont demeurer au campement archéologique et visiter Las Monjas. Le 8 août, ils partent dans la voiture d’un couple d’Américains pour Kabah et Champoton.


Uxmal

Au campement archéologique d’Uxmal. Mardi 7 août. A. parle du dernier habitant qui quitta la ville. Peut-être fit-il encore un dernier tour parmi ces palais, ces temples encore intacts – parfaits – le cœur sans doute chaviré. Un jour, le dernier habitant d’Uxmal quitta la ville. Et puis une jour, quand cela ? Une pierre se détacha d’un édifice, ce fut la première et petit à petit presqu’insensiblement, la ville fut en ruines.

La cour des Monjas.. La nuit, la perfection des proportions est d’autant plus exaltante. (…) Le froissement des ailes des chauves-souris. Les portes des chambres ouvrant sur le noir absolu, joliment rompu de temps à autres par le vol d’une luciole (…) Il est 22h30, j’écris ces lignes à la clarté de la bougie, la fête des insectes bat son plein. Alka tua ce soir dans la pièce un gros scorpion, peut-être cinq centimètres, dard compris.

Le plus beau, lorsqu’un bâtiment est percé de part en part, c’est quand on peut apercevoir au travers de chambres et de couloirs le soleil éclatant de l’autre côté, comme une grande trouée tout au fond. Ces échappées sur lesquelles on rêve étrangement.

J’écris ces lignes assise au sommet de Las Monjas. Pas un touriste. Le chant des oiseaux, les insectes, des poules et la rumeur des cloches qu’on met ici au cou des chevaux pour éviter qu’ils ne se perdent. Pas une voix. Si je tourne autour du sanctuaire ruiné qui domine Las Monjas, j’ai une vision tout à fait insulaire et domine l’ensemble de la plaine verte.



Sur la route entre Peto et Muna

Route Muna-Ticul : grandes palmeraies dont les palmes servent pour les toitures et aussi de paille pour la confection des chapeaux. Très belle église franciscaine de 1624 : San Antonio de Ticul. Le curé voudrait apprendre aux gens à bien se nourrir. (…) Ils vendent leurs œufs, ne mangent presque pas de viande.

Peto : visite du Centro coordinador indigenista de la region maya. Le directeur du centre est du Chiapas. On visite un village qui a depuis un an un grand chemin de terre. Le chef du village qui rentre de sa milpa est en costume de paysan sale et déchiré. Est bouleversé de honte à l’idée que des étrangers lui ont fait l’honneur de venir et le trouvent dans une telle tenue.