Les derniers voyages d’Alfred Métraux

5 - expédition Bonampak


Fernande, Alfred Métraux et Hubert Comte arrivent à la gare de Tenosique à 7h du matin le 22 juillet. Ils déposent leurs bagages à l’hôtel Cortes et essaient de trouver un pilote pour les emmener à Bonampak. Le lendemain midi, un avion est prêt, qui sera piloté par un certain Gonzalo. Le champ d’aviation de Bonampak, où ils arrivent le 23 juillet, est près du village où vivent les Lacandons. Parmi eux, deux Indiens, Vincent et Nabor, acceptent de les guider à travers la forêt vers le camp archéologique, qui se trouve à quatre heures de marche. Ils y passent deux nuits avant de rentrer à Tenosique. Ils partiront au milieu de la nuit suivante pour Campeche.


Embarquement pour Bonampak

A l’hôtel Cortes, nous nous mettons en devoir de joindre le pilote que Comte devait trouver pour le mener à Bonampak (…) L’avenue qui mène de l’aérodrome à la place porte dans sa partie centrale des flamboyants dans toute leur gloire – sans doute dans la rage de modernisme, la vieille place traditionnelle avec ses hauts arbres fut détruite…



Arrivée chez les Lacandons

A midi moins le quart, à peine Alka, écroulé de fatigue, s’était-il assoupi...


Récit.

A pied vers Bonampak

Nous partons donc, étant, croyons-nous, à une heure et demie de Bonampak alors qu’en réalité nous en sommes à trois-quatre heures de marche c’est-à-dire de douze à quinze kms (…) La rivière une fois passée, nous rencontrons plus loin des petits ruisseaux qu’on passe sur des pierres, des ravins boueux, le chemin devient d’autant plus difficile pour Alka qu’il est chaussé de vieux mocassins éculés et qu’il faut toute son énergie pour avancer aussi vivement chargé (…)

Nous arrivons à une rivière, le Lacanja je crois, affluent de l’Usumacinta. Là que faire ? Point de gué.

D’un geste noble, les deux guides nous indiquent que les pirogues sont sur l’autre rive (..) Nous sommes chargés d’appareils qu’il serait difficile de passer à la nage de sorte que Comte et Métraux, sous l’œil approbateur de Vincent et Nabor, se déshabillent et bravement vêtus de leur seul caleçon, entreprennent de gagner l’autre rive pour chercher les pirogues.

Alka pour se déshabiller enlève son chapeau. Vincent lui dit avec stupéfaction : « Tu n’as pas de plumes » (no tienes plumas)

Une heure et demie de marche se passe, puis deux heures, puis trois, je commence à maugréer sérieusement. Comte a filé en avant avec Vincent tandis que Nabor reste en arrière avec nous.

Deux Lacandons passent, doux, souples et bouclés, en tous points pareils à notre ange gardien Nabor. Ils viennent de capturer un bel ara qu’ils portent dans un filet et qu’ils allaient manger (…) Je suis assez à bout lorsque survient un homme botté à cheval. Il me propose sa mule. J’accepte volontiers (…) Je savoure ce repos surtout après la dépense d’énergie nerveuse de l’avion. J’ai aujourd’hui utilisé comme mode de locomotion l’auto, l’avion, la marche à pied, la pirogue, la mule.



Au chantier archéologique de Bonampak

Nous arrivons donc au camp (…). Vincent et Nabor asticotent et mendigotent auprès de tous. (Quand on leur sert à manger) Alka me fait remarquer qu’ils ajoutent des tas de sel et le mangent goulûment. Ils rentrent avec circonspection dans la maison commune, dont ils tournent le bouton d’entrée avec des airs de conspirateurs...

Le lendemain ils traînassent avec nous dans les temples. (…) Quand on leur dit qu’ils sont Mayas et bien qu’ils puissent converser en maya avec un ouvrier maya du campement, ils ne sont pas contents, non ils ne sont pas Mayas mais Caraïbes.